Pendant 35 ans, Francine Daetwyler a fait du jeu un pont entre les générations.

26.06.2025 Partager: E-Mail WhatsApp Facebook

Il y a des présidences discrètes, mais décisives. Celle de Francine Daetwyler, de La Neuveville, a traversé les années comme un fil rouge : solide, constante et toujours tournée vers les autres.

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Jouer, transmettre et rassembler

La Neuveville – Il y a des présidences discrètes, mais décisives. Celle de Francine Daetwyler a traversé les années comme un fil rouge : solide, constante et toujours tournée vers les autres.

Quand on franchit la porte de la Ludothèque de La Neuveville, difficile de ne pas ressentir encore la trace de Francine Daetwyler. Pas une marque figée, mais un souffle vivant. Une manière de faire les choses avec constance, discrétion et conviction. Pendant plus de 35 ans, cette ancienne enseignante a incarné bien plus qu’un rôle de présidente. Elle a porté une vision, accompagné une transformation, semé un élan. Aujourd’hui, à 74 ans, elle transmet le flambeau avec sérénité, après avoir traversé trois décennies et demie sans jamais dévier de son cap : faire du jeu un outil social, culturel et humain.

« Une année, c’est trop court pour donner une impulsion »

Quand Francine rejoint la Ludothèque en 1988, l’association est portée par un petit groupe de mamans bénévoles qui se relaient à la présidence d’année en année. « Ce n’est pas ainsi qu’on construit », dira-t-elle plus tard. Elle propose alors de s’investir sur la durée, le temps d’amorcer une dynamique et de poser des bases solides. Ce qui devait durer deux ans s’est transformé en une présidence de 35 ans. Pas par goût du pouvoir, mais par fidélité à une conviction : « Quand je m’engage, c’est pour construire et faire grandir. »

Très vite, elle perçoit que la ludothèque peut être bien plus qu’un lieu de prêt. Elle suit le cours de base de la Fédération des Ludothèques Suisses (FLS), une formation qu’elle qualifie elle-même de déclic. « J’ai compris tout ce que le jeu pouvait construire humainement. » Par la suite, elle se perfectionne en suivant quelques cours d’une journée et participe aux assemblées des délégués, aux rencontres de l’Arc jurassien, échange avec d’autres responsables, n’hésite jamais à poser les bonnes questions, même lorsqu’elle ne sait pas encore comment faire. « Il faut oser dire que l’on ne sait pas, et surtout entretenir le lien avec la Fédération. »

Bouger avec son temps

Tenir une association sur la durée ? « Il n’y a pas de recette miracle. Il faut avancer avec son temps, garder la ludothèque vivante et ne pas laisser vieillir son équipe. » Dans les années 2000, alors que le numérique s’installe timidement, Francine prend le virage de l’informatisation. « Oui, il y avait des résistances, et c’est un investissement, mais cela en valait la peine. »

Avec l’arrivée et l’accompagnement d’une génération plus jeune, les outils numériques, tout comme le site Internet et les réseaux sociaux, sont vite devenus indispensables pour communiquer, informer et élargir le public. Francine en est convaincue. Mais elle ne se limite pas à l’infrastructure : c’est le contenu même qu’elle renouvelle sans cesse. Lorsqu’arrive la vague des nouveaux jeux de société, elle accueille ce mouvement avec enthousiasme. Elle laisse l’équipe rajeunie moderniser les rayons, organiser des soirées jeux, participer aux marchés et événements communaux. « Il faut laisser les jeunes prendre des initiatives, les écouter, laisser une grande liberté en gardant la confiance et le soutien», insiste-t-elle. Résultat ? Une bouffée de fraîcheur, des retombées positives, l’ouverture de l’offre vers un public plus âgé, une ludothèque qui rayonne au-delà de ses murs.

Présider, c’est veiller

Être présidente, pour Francine, ce n’est pas tout faire. Mais c’est « garder un œil sur tout ». Elle veille aux liens, en particulier avec la commune. « Les conditions ne sont pas les mêmes partout. Nous avons la chance d’avoir une bonne entente avec les autorités, mais ces relations, il faut les entretenir. »

Cette vigilance lui a permis de tenir bon durant les périodes plus creuses. Il y a eu des années difficiles, où la ludothèque a failli fermer. « Quand on croit à ce que l’on fait, on tient bon quoi qu’il arrive, même contre vents et marées. »

Un nouveau tournant arrive en 2012 avec le déménagement dans les locaux actuels, durant l’année du 700e anniversaire de La Neuveville. L’espace est plus fonctionnel, mieux situé. Il marque le début d’un nouveau cycle qui s’essouffle rapidement. Après quelques années de questionnement, l’équipe se renouvelle, se rajeunit, s’étoffe devient multigénérationnelle, tout en y incluant également deux jeunes de 14 ans, très motivés par le bénévolat. « Entre les jeunes, ça a fait un peu boule de neige », observe-t-elle avec le sourire. « Cela a aussi permis de diversifier et d’organiser des postes à responsabilités, tels que l’animation, la communication/marketing, les gestions des jeux et grands jeux (PL et Lego) et de développer de nouvelles compétences » ajoute-t-elle.

Le jeu, un terrain pour tous

Francine n’a jamais cantonné le jeu à la petite enfance. Très tôt, elle élargit le champ. Elle propose des animations dans les homes pour seniors, des après-midis intergénérationnels, des projets en milieu adulte. « Chaque public demande une approche différente. Jouer avec des aînés, c’est un art d’écoute, de douceur. »

Elle continue aujourd’hui à animer ces moments, notamment au Home Montagu, un établissement médico-social (EMS) situé à La Neuveville, qui accueille principalement des personnes âgées. Parce que le jeu, pour elle, n’est pas uniquement une distraction. C’est un catalyseur de mémoire, de lien, de présence. Une autre façon d’être ensemble.

Une transmission dans la continuité

Lors de la dernière assemblée générale de la Ludothèque de La Neuveville, elle a transmis les rênes de la présidence à Vincent Nicollet. Et elle l’a fait avec confiance. « Je lui passe une ludothèque solide, bien ancrée, saine sur les plans administratif et financier. » Elle reste présente pour accompagner la transition, sans s’imposer. Car l’élan est là. Ce qui compte, c’est que l’ouverture d’esprit reste au cœur du projet, que le jeu continue d’évoluer avec la société, d’inspirer et de relier.

Une trace bien vivante

Francine Daetwyler n’a jamais cherché la lumière. Mais son engagement, lui, éclaire une trajectoire exemplaire. Sous sa présidence, la ludothèque est devenue un espace vivant, un repère, un lieu de rencontres, d’apprentissage et de complicité. Elle y a semé l’exigence, l’écoute, le renouvellement. Et elle a su transmettre. Et surtout, elle a rappelé une chose essentielle : que le jeu n’est pas un luxe, ni un passe-temps anodin. Mais un outil pour créer du lien, encourager la rencontre, nourrir les liens et faire durer l’essentiel.

Trois regards sur une transmission réussie

L’héritage laissé par Francine Daetwyler ne se mesure pas seulement à la longévité de son engagement, mais aussi à la reconnaissance exprimée par la jeune génération de bénévoles qu’elle a su accompagner. Nadège, arrivée à la ludothèque par goût du jeu mais aussi pour tisser des liens à La Neuveville, souligne la confiance accordée par Francine : « Si tu ne nous avais pas laissé autant de place tout en partageant ton expérience, nous n’en serions pas là aujourd’hui. » Pour elle, la modernisation de l’offre et l’ouverture à un public plus large ont été rendues possibles par cette posture d’écoute et de bienveillance.

Vincent, quant à lui, a d’abord découvert la ludothèque par les soirées jeux. Devenu bénévole, puis président en 2025, il évoque une ambiance « bonne et saine », une équipe multigénérationnelle et une grande ouverture aux évolutions, qu’il s’agisse du nouveau site ou de l’acquisition de jeux plus adultes. Il se dit « particulièrement reconnaissant » de reprendre une structure aussi bien construite, saluant le travail accompli.

Katia, enfin, met en avant l’espace de liberté et de créativité qu’elle a trouvé à la ludothèque. Son bénévolat lui a permis de développer de nouvelles compétences, notamment en communication. « Les projets sont divers et passionnants, on ne s’ennuie jamais », affirme-t-elle, insistant sur le climat de confiance et de soutien insufflé par Francine.

Trois voix, une même gratitude : celle d’avoir trouvé, sous la présidence de Francine, un lieu où l’on ose, où l’on apprend et où l’on construit ensemble.

Céline Latscha (Journaliste)

 

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